L'almanachronique du 12 janvier
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Dans la région d'Auch, pour conjurer le sort d'un dé mal jeté, Auguste de la Bigourdane créa une gazette locale le 3 octobre 1852. Seul rédacteur de ce modeste canard, Auguste y relatait les petits potins, les historiettes d'histrions hâbleurs et autres anecdotes plus ou moins croustillantes. Le petit gersois était né.
Ainsi, au fil des ans, l'hobereau gazetier imprima avec passion cet humble journal qui reste néanmoins un formidable témoin du temps passé.
Le petit gersois du 12 janvier 1865, par exemple, relate qu'au hameau de Gaujan s'était formé un rassemblement considérable. Sur une charrette attelée de deux boeufs avaient pris place des familles de paysans singeant l'autorité du canton sous toutes ses formes : un maire endimanché, un instituteur précieux, un juge bouffi, un commerçant crasseux qui proférait des blagues racistes, des gendarmes ivres ainsi qu'un gros bourgeois gras, ventripotent propriétaire des terres arables. La voiture était précédée d'une foule compacte de buveurs obstinés, de bluffeurs ignares et hilares, de suceurs de moelle, de tuteurs de grillons chevauchant des ânes cagneux et de frondeurs spongieux plus braillards qu'une horde d'excitateurs révolutionnaires en mal de sang bleu. Toute cette foule délirante se rendait au champ du Haut-Chêne, lieu singulier où se rendait une fois l'an la justice. Arrivés à terme, ces comédiens d'un jour, administrés par leur seule frénésie décadente dotée d'une bonne dose d'ébriété populaire, se mirent en place les uns en face des autres, la plèbe contre le pouvoir. S'en suivit une étonnante mêlée belliqueuse et réjouissante où moult baffes furent adjugées avec noblesse, où les insultes les plus pittoresques pleuvaient drues et où les coups les plus bas couvraient sans mal des chansons absconces farcies d'obscénités que chantaient les femmes vierges de l'année et qui tombaient la culotte plus vite qu'un lapin de garenne enragé.
Après cette échauffourée profonde, le pouvoir enfin chu, les gueux gais en cabotins fêlés se réunissaient pour une aimable ripaille fortifiante, bien arrosée et bien léchée.
C'était leur façon d'expier leur poltronnerie annuelle face à un pouvoir grotesquement craint.
Cette coutume a malheureusement disparu. Les gens continuent de boire et d'étriller la souveraineté prosaïque mais solitaires et résignés.
Vive la gabegie !