L'almanachronique du 10 juillet

Publié le par blancafort

Hello les blogos ! Creusons, creusons la blogose !

Enfin !
Après bien des kilomètres sur les routes sinueuses, non loin de Ahun ( Un bien joli nom qui permet à peu de frais de se râcler la gorge ), j'ai enfin trouvé la possibilité de pianoter les touches noires d'un ordinateur. Il trône là et las sur l'autel d'une ancienne chapelle, devenue office du tourisme pour la bonne cause et le salut de quelques âmes perdues.
En contre-haut d'une de ces vallées que dominent des cieux inégaux s'étend, juste ce qu'il faut au-dessus du niveau de la mer, le village de Chantemille. Un village qui n'est ni plus ni moins qu'un château du Xème siècle, entouré de menues maisons austères. Les murs de ce bourg, bâti sur une colline, sont mornes et châtiés par le temps, les rues inexistantes et les venelles tortueuses. Une belle grand-route de style Haussmann ( ce qui est un exploit ici !) y entre par le nord, mais se perd très vite dans ses voies étroites et n'en sort que sentier de sangliers, que l'on suppose monstrueux, tant la rudesse des lieux est effrayante.
Chantemille ne possède rien de ce qui fait un endroit habité du XXIème siècle. Pas de commerces, encore moins de bars, elle ne peut s'enorgueillir du moindre charme légendaire des trous-du-cul paumés qui font la joie des "estrangers" en mal d'aventure hexagonale. Le château se dresse juste en dehors du bourg sur un rocher dominant la Creuse un peu plus élevé, près d'une forêt qu'on s'imagine aussi drue que la pilosité nasale de monsieur le Maire, un certain Robert, paysan à ses heures et cacochyme vicieux en permanence. 
Le château a été construit fort en retrait de la route principale, et entouré de jardins pitoyables et de terrasses distorsionnées qui commandent en tout sens un manque stupéfiant de panorama. Disproportionné, il y règne un certain air de laideur désolée. Car ce n'est plus un château. On ne peut même pas dire que c'est une ruine. Peut être décombres, voire déchets. Les spectres des féodaux de jadis ruinés le hantent. Il semble que personne ne vienne jamais humer les rares piètres rosiers qui jouxtent l'improbable puits sans fond. Deux pigeonniers se dressent lugubres et vides. Les sols désertés de carreaux sont envahis d'herbe.
Ce n'est qu'en prêtant une oreille plus qu'attentive, le soir de mon arrivée, que j'ai pu distinguer une rumeur lointaine et confuse - une rumeur de vie - tel un chant, s'élevant puis tombant, et un ronronnement soutenu : les cris stridents de quelques grillons perclus de douleur, chantant la nuit qui tombe et la mort savoureuse. Le bonheur de la villégiature bucolique !
J'habite une petite maison, louée à une vieille sans nom, elle l'aurait perdu dit-on lors d'une partie de crapette; maison gracieuse, pour ne pas dire délabrée, dont les murs sans fenêtres semblent comme attirés vers le milieu de la seule pièce qui fait office de cuisine et de chambre, et accessoirement de salle de bain quand le puits central déborde. Et il déborde régulièrement tant la pluie semble être en Creuse comme chez elle, et surtout en été, par souci de contradiction, et un réel sens d'insurrection estivale. Au-dehors, s'étend un grand jardin où pousse allègrement un chiendent à balais dont se nourrissent les ballots d'ici. C'est vous dire l'éclat de la gastronomie régionale !
J'ai posé mes bagages hier, et j'écris.
Aujourd'hui, je vais visiter les alentours. Un début de rhume agresse mon tarin affiné. Il faudra que je pense à surélever mon plumard. Dormir les pieds dans l'eau, après l'orage d'hier, n'est pas conseillé dans ce pays.
La mort veille.
A suivre...

Publié dans Chroniques

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