L'almanachronique du 16 septembre

Publié le par blancafort

Hello les blogos ! Ayayaï la blogose !

Je déconseille tout à fait l'écoute matinale d'un expert économiste. Tout au moins aux personnes sensibles. D'abord parce que l'économiste est frénétiquement enthousiaste. Sa ferveur infaillible, dès le potron-minette, est pleine et absolue. Elle déborde, et même surabonde, de toute part. Rien ne décourage plus autant l'économiste que la perte irrémédiable de son exaltation forcée. Il lui faut la nourrir au quotidien, constamment. On imagine fort bien cet économiste, cravate nouée et gilet marouflé au corps, les veines gonflées, chaudes de fièvre, s'enthousiasmer fougueusement seul dans son duplex anthracite, un oeil sur le New-York Times, un autre oeil, plus givré, sur Les Echos. Internet sur grand écran, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Le voilà fin prêt. Les théories acérées, les schémas affûtés, les diagrammes affilés. Sa conviction bien chevillée au corps. Il s'enduit alors d'une mixtion subtile, composée de sang de chauve-souris, de graisse de bouc, d'ectoplasme d'ouvrier cégétiste, d'un peu de coriandre, pour ses vertus carminatives, et d'un soupçon de queue de vache tuberculeuse. L'économiste peut alors s'animer. Il s'enflamme pour la courbe descendante et la chute vertigineuse d'un indice, se galvanise des Swaps et autres Forwards, s'embrase de gré à gré sur la liquidité solide des contrats à terme et, finalement, s'irrite de la théorie opposée dite de l'efficience du marché, imprévue et aléatoire. Il n'en joue pas moins sur l'émotion, et il reste sûr de son impact, car il y aura toujours des journalistes pour tenter d'expliquer au petit peuple l'invraisemblable. L'économiste développe ainsi son discours souverain, l'obscénité serait de se taire, en assénant moult conseils, suggestions raisonnables et recommandations mûrement réfléchies et prudentes. Il s'arrange pour qu'on ne puisse pas le contredire. Les théories sont imparables. La crise financière ? Elle est de bonne guerre. Elle jugule un milieu corrompu. Diantre ! Une possible récession ? Que du bonheur ! Elle permettra à la longue d'optimiser une économie trop expansionniste, de limiter les flux indécents des capitaux circulants. La mort de Lehman Brothers ? Elle était prévue de longue date. Trop vieille, trop lourde, trop "américaine". Le mieux ce fut qu'elle changeasse plus tôt de nationalité. Nous l'avions prédit. On vous l'avait dit. Et l'économiste de théoriser encore et encore, de dire ce qu'il faudrait ou ne pas faire, de donner des bons points, de simplifier merveilleusement la matérialisation du marché et de leurs liquidités injustement contaminées. On en a le souffle coupé de tant de lucidité. On se plaît à croire que l'on comprend mieux notre désarroi, notre trouble. La complexité n'était qu'illusoire. L'économie est d'ailleurs bien plus simple que la philosophie. La philosophie est métaphysique, bien trop rationnelle. Et quoi de plus complexe que la raison ? Que l'homme ? L'économie elle, n'a pas besoin de l'homme. Donc...
Et voilà ! Quand je vous le disais qu'il ne faut pas écouter un économiste au matin ! Je débloque ! Vivement ce soir !
Et c'est ainsi qu' Allah est grand, et, dit-on, très fortuné.

Publié dans Chroniques

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