Un peu de poésie ma mie !!
Voici un petit poème, dont la mélancolie semble avoir convenu au 18° siècle, de Jean-Baptiste Rousseau (1669-1741), esprit moqueur et aigri, auteur de saillies épigrammatiques du plus bel effet.
STANCES
Que l'homme est bien, pendant sa vie
Un parfait miroir de douleurs!
Dès qu'il respire, il pleure, il crie
Et semble prévoir ses malheurs.
Dans l'enfance, toujours des pleurs.
Un pédant porteur de tristesse,
Des livres de toutes couleurs,
Des châtiments de toute espèce.
L'ardente et fougueuse jeunesse
Le met encore en pire état.
Des créanciers, une maîtresse
Le tourmentent comme un forçat.
Dans l'âge mûr, autre combat.
L'ambition le sollicite;
Richesses, dignités, éclat,
Soins de famille, tout l'agite.
Vieux, on le méprise, on l'évite.
Mauvaise humeur, infirmité.
Toux, gravelle, goutte, pituite,
Assiègent sa caducité.
Pour comble de calamité,
Un directeur s'en rend le maître.
Il meurt enfin, peu regretté.
C'était bien la peine de naître !